"L’ouragan" du 15 au 16 octobre 1987

I. Synthèse de l’événement

Date de début d’événement : 15 octobre 1987 à 13 heures locales

Date de fin d’événement : 16 octobre 1987 à 16 heures locales

Type d’événement : dépression atlantique de type SW (classification Dreveton)

Départements touchés ou régions concernées :

Régions impactées

Toutes les régions sont impactées à des degrés divers exceptée la Corse qui est la seule région véritablement à l’écart.

Les côtes de la Manche, de la Bretagne au Nord-Pas de Calais, subissent de plein fouet les violentes rafales.

Le centre de l’Aquitaine et l’extrême sud-est de Provence-Alpes-Côte d’Azur ne subissent par cette tempête.

Résumé :
Une dépression atlantique gagne la pointe bretonne le 15 octobre puis remonte sur l’Angleterre la nuit suivante et le lendemain. Les vents associés, de Sud-Sud-Ouest, sont particulièrement violents, atteignant 140 km/h en rafales dans les terres et plus de 160 km/h sur le littoral.

Les vents les plus forts touchent un grand quart nord-ouest du pays, de la Rochelle à Lille, en passant par la région parisienne. Ils causent plusieurs victimes et de nombreux dégâts matériels.

Intensité maximumDuréeSurface du territoire métropolitain touchéIndice de sévérité
216 km/h (Pointe du Raz le 16/10/1987)
27 heures
32 %
exceptionnel

II. Description de la situation météorologique



La journée du 15 octobre 1987 et la nuit suivante circulent deux dépressions atlantiques successives remontant du Sud-Ouest.

Baromètre Ouessant du 14 au 16 oct 1987

La première dépression à 970 hPa se situe au niveau de Ouessant à 18 h UTC et donne seulement quelques rafales de vent. Mais à l’arrière, la suivante, située au nord-ouest de l’Espagne à 12 h UTC circule rapidement jusqu’à la pointe bretonne. Sa progression s’accompagne d’un creusement important, dû notamment à la rencontre de l’air froid descendant du nord avec les eaux encore chaudes de l’Atlantique. Cette différence de températures ne fait que renforcer l’instabilité et la puissance du système.

La seconde dépression frôle à son tour Ouessant vers 23 h UTC, avec une pression au niveau de la mer minimale de 957 hPa, relevée à la station de Brest mais un peu moins de 950 hPa à Ouessant (voir le barographe ci-contre).
Elle traverse ensuite l’Angleterre durant la nuit, puis poursuit sa trajectoire vers le nord dans la journée du 16 tout en se comblant progressivement.

Analyse du 15/10/1987 à 18 h UTC Analyse du 16/10/1987 à 00 h UTC
Analyse Surface le 15 Analyse surface le 16

III. Vent

Rafales maximales observées Rafales maximales estimées
Rafales maximales observées Rafales estimées de l'événement

Les vents soufflent en tempête dès la soirée du 15 octobre sur la Charente-Maritime, la Gironde, et les Pays de la Loire, avec des pointes autour de 140 km/h.

Les rafales se décalent ensuite vers le nord, balayant d’abord la Bretagne, où les plus fortes valeurs sont enregistrées. Elles atteignent alors 120 à 150 km/h dans les terres et 170 à 200 km/h sur les régions côtières.

Elles touchent en seconde partie de nuit la Normandie, avec des valeurs encore élevées, puis de manière moins violente la région parisienne et la Picardie.

Enfin, ces vents forts évacuent notre pays par le Nord - Pas de Calais, avoisinant sur cette dernière région les 170 km/h au matin du 16.

Le vent moyen soufflant sur cet épisode est également remarquable sur la pointe bretonne, atteignant 80 à 120 km/h en général au plus fort de la tempête, mais 144 km/h à Quimper, et 176 km/h pour la pointe de Penmarch.

Rafales remarquables mesurées entre le 15/10/1987 et le 16/10/1987
RégionDépartementPosteAltitude (m)Vent instantané maximal (km/h)Date et heure de mesure
Bretagne 29 Pointe du Raz 67 216 16/10/1987
Haute-Normandie 76 Cap-de-la-Hève 100 180 16/10/1987 01h20 UTC
Nord - Pas de Calais 62 Boulogne-sur-Mer 73 166 16/10/1987 04h45 UTC
Basse-Normandie 50 Gonneville 134 155 16/10/1987 01h05 UTC
Charente-Maritime 17 Pointe de Chassiron 11 144 15/10/1987 22h15 UTC
Pays de la Loire 85 L’Île d’Yeu 32 144 15/10/1987 22h15 UTC
Île-de-France 95 Roissy 108 119 16/10/1987 02h14 UTC
Picardie 60 Beauvais 89 119 16/10/1987 03h32 UTC

En Basse-Normandie, l’enregistreur de vent à la Pointe-de-la-Hague a été arraché. Par ailleurs l’enregistreur est arrivé en butée au sémaphore de la pointe du Roc à Granville (sommet de falaise) soit 216 km/h et le sodar de la station de Jobourg à 176 m a enregistré 242 km/h ; on peut donc raisonnablement penser que les rafales étaient de l’ordre de 200 km/h au sémaphore de la Hague.

IV. Phénomènes météorologiques associés

Cumul pluviométrique le 15/10/1987

Cumul pluviométrique le 15 octobre 1987

Période du cumul : de 08 h locales le 15 à 08 h locales le 16.

Cette tempête s’accompagne de pluies sur la Bretagne et les Pays-de-la-Loire, avec des cumuls de 20 à 40 mm en 24 heures par endroit, relevés principalement le 15 octobre.

V. Impacts socio-économiques

De part sa violence record, les conséquences du passage de cette tempête sur notre pays sont considérables. On recense 15 morts et les dégâts matériels sont estimés à 3,5 milliards d’euros (23 milliards de francs de l’époque).
1 250 000 abonnés sont privés d’électricité et le quart des forêts bretonnes est détruit.
Plusieurs clochers d’églises sont tombés, dont celui de Concarneau. Suite à cet épisode, l’église sera fermée, et finalement détruite quelques années plus tard.
Sur les bords de mer, de nombreux bateaux ont coulés ou se sont échoués, et sur le sud-ouest, 600 tonnes d’huîtres sont perdues, soit la moitié de la production de la région.

Informations complémentaires disponibles sur le site des tempêtes avec submersion : étude Vimers des événements de tempête en Bretagne par Météo-France, le SHOM (Service Hydrologique et Océanographique de la Marine) et le Céréma (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement).

VI. Remarques

Les dommages causés par cette tempête sont équivalents à ceux d’un ouragan de force 3 dans l’échelle de Saffir-Simpson, ce qui lui a valu le nom d’Ouragan de 1987 par les médias (The Great Storm of 1987 pour les Anglo-saxons).

Cependant, ce terme d’ouragan ne s’applique pas puisqu’il s’utilise uniquement pour des cyclones tropicaux, alors qu’il s’agit ici d’une dépression de grande échelle.

La Grande-Bretagne a été touchée encore plus durement que la France, par les vents violents, mais également par des pluies diluviennes qui ont suivi le passage de la dépression principale. Les Britanniques estiment cette tempête comme la plus violente depuis celle de novembre 1703.

Voir aussi : P. Donguy 20 ans déjà ! L’ouragan d’octobre 1987 - Octobre 2007, revue La Météorologie, n°61, mai 2008